La juxtaposition des 4 vidéos, ci-après, à quelque-chose de fascinant.
Les 3 premières illustrent bien le propos de Ben Hammersley.
Les Anonymous sur France2 - Complément d'enquête from anon on Vimeo.
LIFT Conference 2011, Geneva from Ben Hammersley on Vimeo.
Cette dernière vidéo permet à Laurent Chambon, en faisant bien sur référence à la Tunisie et à l'Egypte, d'affirmer dans un très bel article, que "tout est prêt pour le changement".
Je ne suis pas sur de partager son optimisme.
"Tout le monde sent bien qu’on est en train de sortir d’une décennie affreuse, réactionnaire, gaspilleuse, flambeuse, inégalitaire et violente. Les événements de la place Tahrir et les fumées à Fukushima ont fermé l’ère commencée par un certain 11 septembre. Tout est encore très incertain, très violent aussi. Des gens meurent encore aujourd'hui. Mais je vois mal comment nous allons accepter de revenir en arrière, retourner vers le pseudo-choc des civilisations, les dictatures justifiées par la menace terroriste, le nucléaire pour lutter contre les gaz à effet de serre, le pétrole sans fin pour nourir la machine, la « démocratie représentative » qui ne semble représenter que les privilégiés et les multinationales...
Tout est prêt pour le changement. Je suis un peu excité. J'ai aussi un peu peur, en fait."
D'abord, Ben Hammersley a tort. Et ce, malgré la juxtaposition qui semble illustrer si parfaitement sa théorie ci-dessus. Il a tort, d'abord, parce que ce qu'il énonce est une tendance, pas un raz de marée. Les jeunes gens, ont toujours des profs, pour les sportifs, des entraineurs, et ... des parents.... Si si. Ces gens là imposent aux jeunes une règle hiérarchique (et heureusement!).
Il a tort aussi, et peut-être surtout, parce-qu'il suppose que les sociétés convergent.
Une première remarque, les gens proches des frontières, ont toujours été significativement plus nationalistes. Si la frontière n'existe plus, c'est qu'elle est partout... Avec la radicalisation que l'on constate.
Une deuxième remarque, il est évident que l'uniformisation géographique fonctionne moins bien. Et paradoxalement, cette remarque ne s'applique pas tant aux nouveaux arrivants, qu'aux dominants et à leur capital "symbolique" (qui finit quand même par être sonnant et trébuchant...) . Hammersley le remarque d'ailleurs lui aussi (la référence aux amis qui vivent partout et pas l'appartement à côté).
La où je suis en désaccord avec Hammersley, c'est qu'il hiérarchise le capital symbolique. Lui, et les gens qui l'écoutent sont, pour lui, l'élite de la culture mondiale.
Pour moi ce ne sont que les avatars (et j'en fait partie....) d'une culture américano centrée qui a atteint son apogée au début des années 2000, qui est en train de s'effondrer.
Il suffit pour s'en convaincre de regarder la liste des participants au lift, ce sont TOUS des White Anglo Saxon Protestants et affidés.
C'est effrayant de cécité!!!
Comme le souligne le leap2020:
Monolinguisme ou multilinguisme constitue d'ailleurs selon LEAP/E2020 un premier critère très simple d'évaluation pour savoir si un projet ou une organisation à vocation internationale appartient plutôt au monde d'avant la crise ou au contraire est déjà en partie adaptée au monde d'après.
Je n'en veux pas à Ben Hammersley, c'est son monde, il est dedans, il ne peut pas en sortir. Encore que, Donald Rumsfeld l'a compris et énoncé en 2002:
"[T]here are known knowns; there are things we know we know.
We also know there are known unknowns; that is to say we know there are some things we do not know.
But there are also unknown unknowns – the ones we don't know we don't know."
Comme l'explique Todd, c'est une forme d'aveuglement de considérer que les sociétés s'uniformisent.
Ce que nous constatons aujourd'hui en Tunisie et en Egypte est le pendant de ce qui s'est passé en Iran en 79.
Les causes en sont démographiques, culturelles (taux d'alphabétisation) et technologiques (Chambon a raison sur ce point).
Le problème c'est que nous ramenons tout à notre vision du monde, et que nous écoutons dans une forme d'auto intoxication pathologique, ceux qui maitrisent les rouages de communication de l'Empire, et qui pour y accéder, ont du développer un habitus concordant.
Mais ces gens là sont -ils représentatifs???
Il y a eu le flux culturel américano occidentaliste, qui à recouvert le rivage, il se retire, on va voir ce qu'il y a dessous.
Et, oui, effectivement les technos vont nous permettre de voir la couleur du sable de près....
Tout est prêt pour le changement. Je suis un peu excité. J'ai aussi très peur, en fait.